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Confinement : Semaine 8

Le confinement national vu d’une colocation parisienne.

Jour 57 –Dimanche 10 mai 2020

Cette dernière semaine de confinement a été quelques peu mouvementée. Il nous tardait de savoir quelles allaient être les annonces du gouvernement. Le discours étant prévu pour jeudi, nous avons passé un début de semaine assez morose, entre l’impatience et l’appréhension. Quand jeudi 16h00 est enfin arrivé, nous nous sommes réuni·e·s dans le salon pour regarder l’allocution des différent·e·s ministres, chacun·e détaillant les mesures prises dans leurs ministères. Le déconfinement a été officialisé pour le lundi 11 mai, mais à part la possibilité de sortir de chez soi à plus d’un km, et sans attestation, nous avons réalisé que nos quotidiens n’allaient pas revenir du tout à la normale. Malgré ces nouvelles peu réjouissantes, nous avons commencé à faire des plans pour la semaine suivante. Marion aimerait aller voir ses parents, Cassandre les siens, Samson prévoit d’aller voir ses ami·e·s, et je pense aller dès que possible à Brunoy pour voir ma sœur et mes copines qui m’ont tant manquées ! Les derniers jours ont été les plus durs. Comme lorsqu’on a envie d’aller aux toilettes, plus on se rapproche du but, plus l’envie se fait pressante !

C’est samedi que les péripéties sont arrivées ! En me réveillant, j’ai remarqué que j’avais des petits boutons étranges sur un doigt, les mêmes qui étaient apparus au même endroit quelques semaines plus tôt. J’en ai parlé à Marion, et elle a évoqué le fait que ça pourrait être des symptômes du virus, en demandant si ce n’était pas des engelures. Après un moment de réflexion, je me suis dit qu’il valait mieux prendre rendez-vous avec une dermato afin de s’assurer qu’il n’y avait rien de grave. J’ai trouvé une médecin qui avait de la place en visio l’après-midi même. C’était la première fois que je testais la télé-consultation ; c’est curieux comme expérience ! Elle m’a dit que ce n’était probablement rien, mais dans le doute, m’a prescris une prise de sang. Sachant que Marion et moi voulions toutes les deux quitter Paris dès lundi, il fallait avoir les résultats dès que possible. Malheureusement les laboratoires étaient tous notés comme fermés sur internet.

Cela m’a paru étrange en cette période de virus, j’ai donc appelé Samson et Cassandre, qui étaient partis faire des courses, pour qu’ils regardent en passant si le laboratoire d’à côté était ouvert. Iels m’ont appelé une vingtaine de minutes après pour me dire que oui, mais qu’une dame qui attendait devant leur avait dit qu’il fallait venir avant 15h pour être sûre de passer avant la fermeture, deux heures plus tard. Il était 14h45. J’ai donc attrapé mes affaire en vitesse, et je suis sortie en trombe de la maison. J’ai croisé Samson et Cass qui m’ont souhaité bonne chance, et j’ai foncé au labo. J’ai pu rentrer sans problème. Après un peu d’attente, j’ai fait ma prise de sang, et suis repartie avec l’assurance d’avoir mes résultats sous vingt-quatre heures.

Dimanche fut une longue journée, j’ai regardé ma boite mail toutes les quinze minutes, les colocs étaient aussi impatient·e·s que moi d’avoir les résultats. Mais ils n’arrivaient pas… Je me suis résolue au fait que je ne les aurai probablement que lundi, les labo étant fermés le dimanche. J’étais en plein dans ces réflexions lorsque que j’ai entendu frapper à la porte. Je suis allée ouvrir, et je me suis retrouvée face à une vieille dame que je ne connaissais pas. J’ai d’abord cru qu’il s’agissait de notre propriétaire, mais Samson m’a toujours dit que cette dernière était plutôt petite, hors la femme devant moi me dépassait d’une bonne tête. Je l’ai regardé interloqué. Elle m’a souri, et m’a alors demandé si je la reconnaissais. Et effectivement, plus je scrutais son visage, plus il me paraissait familier.

J’ai alors compris de qui il s’agissait. J’avais du mal à y croire, mais je n’ai pas protesté lorsqu’elle m’a demandé si elle pouvait entrer. Nous avons monté les escaliers en silence, et sommes arrivés dans le salon, où Samson, Marion et Cassandre étaient installé·e·s. Iels m’ont demandé de qui il s’agissait. La vieille dame s’est alors avancée, et j’ai vu à leurs têtes qu’iels avaient aussi compris. Cette femme dans notre salon n’était autre que Marion.

Elle a demandé à s’assoir, nous expliquant que sa forme déclinait et que le voyage dans le temps l’affaiblissait plus que dans le temps. Nous lui avons servi un verre d’eau. Personne n’osait parler, et Marion du présent semblait au bord de l’évanouissement. Elle a alors entrepris de nous expliquer ce qu’il se passait.

En décembre 2021, la situation est devenue catastrophique en France. Après plus d’un an de confinement ininterrompu, la population était au bord de la crise de nerf. De plus en plus de voix s’élevaient contre cette quarantaine à rallonge, dénonçant une mascarade du gouvernement pour maintenir le peuple sous son joug. Pourquoi l’Etat ferait-il ça avons-nous demandé ? Cela ne mettrait-il pas la situation économique dans une tourmente irréversible ?

Il se trouve que si. Ce qui permis au Président et ses ministres de faire passer des lois plus liberticides les unes que les autres, prétextant le bien des citoyen·ne·s et évitant ainsi les manifestations qu’elles auraient pu soulever. Et le 27 décembre 2021, alors que les familles célébraient comme elles le pouvaient les fêtes de fin d’année, le gouvernement fit passer celle qui changea tout : l’allongement du mandat du président, pour une durée indéterminée. Ils venaient de tuer la démocratie.

En janvier 2022, lorsque les françaises et français eurent cuvé leur nouvel an, et que le gouvernement fit l’annonce de cette loi, des pans entiers de la population tentèrent de se soulever. Ils furent sévèrement réprimandés, et le chiffre des mort·e·s et disparu·e·s restent encore inconnu pour la Marion du futur. C’est alors que le peuple compris : la France était désormais dirigé par un état dictatorial.

Certains et certaines ne voulurent pas voir la vérité en face. Ils et elles restaient persuadé·e·s que la situation était temporaire, et que tout reviendrait à la normale lorsque le virus aurait disparu. Mais y avait-il encore un virus ? Les informations liées aux chiffres du Covid-19 étaient floues depuis un moment. Celles et ceux qui n’y croyaient plus ne pouvaient pas resté·e·s les bras croisés. Il leur fallait agir.

C’est ainsi que se créa un mouvement de résistance sous-terrain. Internet ne fonctionnait presque plus, mais grâce à d’ingénieux hackeur·se·s et bidouilleur·se·s, un réseau secret se mis en place. Les futur·e·s Samson, Cassandre, Marion et Alice apprirent son existence grâce à des contacts de Samson. Cela leur prit quelques semaines, mais iels réussirent à se procurer le matériel nécessaire à la mise en place du système. Et leur vie prit un tournant dont iels ne reviendraient jamais.

La Marion âgée nous dit qu’il y avait beaucoup à dire sur la suite des aventures, mais qu’elle ne pouvait pas tout dévoiler, et qu’elle ne voulait pas nous spoiler. Ce choix de mot nous parut bien léger pour la situation qu’elle nous décrivait, d’autant qu’un petit sourire vint éclairer son visage. Nous étions sonné·e·s, personne ne sut quoi dire pendant de longues minutes. Puis Cassandre prit enfin la parole, et lui demanda pourquoi elle était venue nous révéler tout ça. Marion âgée prit alors une grande inspiration, nous regarda tour à tour dans les yeux, et déclara : « Parce que, mes jeunes ami·e·s, vous allez avoir un rôle à jouer dans cette histoire, bien plus important que vous ne pouvez l’imaginer. Et ce, dès à présent… »

FIN

CategoriesConfinement

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