J’ai créé cette série photo en collaboration avec la maquilleuse Sophie Moutier. Avec ce projet, je souhaite parler des restrictions vestimentaires que s’imposent malgré elles les femmes dans les espaces publics. Ces interdictions sont tacites mais bien réelles. Trop couvertes ou pas assez, trop apprêtées ou négligées, les tenues des femmes sont trop souvent soumises aux diktats imposés par la société. Ne pas s’y soumettre devient un acte de bravoure, faisant d’elles des Guerrières !
ÉLÉONORE






« J’ai choisi cette tenue car c’est une robe que je n’ose jamais mettre.
Symbole de la jeunesse, je pensais que le temps était passé et avec lui celui de me faire remarquer, il était temps d’arborer quelque chose de plus sérieux, de plus conventionnel. Et puis ce décolleté était probablement plus « décent » il y a 15 ans.
J’y avait donc renoncé et m’amusais à la passer seule devant un miroir. Malheureusement, je pouvais plus la fermer depuis longtemps…
Et puis un jour, alors que je m’apprêtais à la donner à une jeune fille, celle-ci m’a fait remarqué qu’il me suffirait de l’agrandir.
Je l’ai donc emmené chez une couturière. Elles ma demandé si c’était pour une occasion particulière. Ça m’a fait sourire car j’ai réalisé que toutes les occasions étaient particulières et qu’il ne tenait qu’à moi d’enfiler cette robe, même pour faire mon marché !
Ça m’a fait réaliser que je me mettais toute seule des limites imaginaires. Qu’il ne tenait qu’à moi d’agrandir un bout de tissus tout comme certaines de mes croyances.
Cette robe sera donc portée plus souvent maintenant et elle sera la digne guerrière du temps ! »
CÉCILE






« Le thème guerrière est un thème intemporel mais aussi d’actualité, qui définit la femme d’aujourd’hui comme une guerrière. Pourquoi ? Car les femmes doivent malheureusement toujours se battre pour affirmer leur place dans la société. Dans mon cas, en tant que femme de couleur, jeune maman, cadre dynamique mais qui rêverait de troquer les open spaces pour les planches du théâtre. Cette tenue reflète vraiment qui je suis entre ma coiffure afro, le rose qui est ma couleur préférée, les paillettes et les grosses bottes en cuir.
Sur ces photos je suis un mélange de guerrière Massaï et de Wonder Woman. Les guerrières 2.0 Working Girl et/ou Mom’preneur sont toutes ces cadres dynamiques et jeunes mamans qui doivent toujours se battre aujourd’hui dans le monde du travail. Elles sont obligées de justifier tous les jours à leur hiérarchie qu’elles peuvent réussir leur carrière et leur vie de famille. »
FRANÇOISE






« Je crois que cette tenue est liée à la nuit, la blanche, celle qui à présent est synonyme d’insomnie et non de fête. »
NATHALIE





SOPHIE





RÉBECCA





MAUD





Et puis, l’âge avançant on se confronte au regard des autres. Ce regard qui te demande de changer pour plaire puisque sans ce changement, il n’y aurait a priori pas de chance de séduire. Donc choisir cette tenue était pour moi une provocation. »
JESSICA





JULIA





J’ai choisi cette robe violette, c’est ma couleur préférée, le mélange du rouge de la fougue et la sagesse du bleu. Quand je porte une tenue que j’aime, je me sens prête à conquérir le monde et « faire la guerre » en sortant de chez moi ! On lutte, on s’accroche, on se bat, on fait des concessions, on gagne, on perd, bref on apprend chaque jour ! »
CLARA





« Quand je porte cette robe, je me sens à l’aise mais coupable. »
BÉRÉNICE





ANAÏS






« Je porte ce short en souvenir de ce mec qui m’a claqué les fesses en passant en scooter ; ce body parce qu’il est trop décolleté ; ces chaussettes hautes en hommage à cette cliente sur le tournage d’une pub qui avait dit que j’avais de trop gros mollets ; ces rollers parce qu’ils décuplent ma sensation d’être trop grande et maladroite, trop visible ; cette perruque pour ne plus être “banale”. »
CHARLOTTE






CÉLINE






« Quelques jours avant le shooting photo, j’ai porté cette robe toute une journée parce qu’il faisait chaud et que je ne voulais pas nager dans la chaleur étouffante d’un pantalon. Dans le métro, un homme m’a interpellé en me criant dessus dans une langue que je ne connaissais pas et en me faisant des signes envers mon décolleté. Il semblait m’insulter. Je lui ai fait un doigt d’honneur. Ça ne l’a pas calmé, il s’est avancé et dans un mouvement brusque il a avancé son bassin vers moi. Étant assise et lui debout, ses parties génitales étaient tout près de mon visage pendant un bref instant. Un instant violent. Un instant qui veut dire : puisque je possède un pénis, c’est moi qui décide, j’ai le pouvoir. À ce moment-là, quatre femmes assisent autour de moi qui regardaient la scène se sont mise à lui crier dessus, à l’insulter, à lui ordonner de partir. Je me suis mise à hurler de concert avec elles. Il est parti.
Je veux porter cette robe pour honorer ces femmes, notre acte commun, notre sororité, les rires que nous avons partagé quand il est parti. Des rires triomphants. On célébrait ensemble notre liberté retrouvée après une bataille contre l’absurde. »